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19/03/2014

Olivier Le Gendre :  "Catholique, il me restait à devenir chrétien !" [2]

Dans Pourquoi je crois, Le Gendre témoigne de son itinéraire. Profond, vrai, et... motivant :

 


 

2. Des changements en nous-même

Membre d'une famille catho de Neuilly qui avait élevé ses enfants en écartant de leur foyer un ''mauvais exemple'' de cousine divorcée, Olivier Le Gendre témoigne de l'échec de cette pédagogie : ''à part ma soeur célibataire et moi (marié depuis plus de trente-cinq ans avec la même femme), le reste de la fratrie emprunta ce chemin douloureux du divorce suivi d'un second mariage, voire d'un troisième...'' Élevé dans un pieux établissement scolaire, il y constata que l'école catholique n'est pas infaillible et qu'une certaine confusion des rôles – ces prêtres à la fois profs, catéchistes, pions et confesseurs – n'a pas forcément de bons effets sur tous les élèves... Son collège, écrit-il, ''livrait chaque année un contingent record de révoltés, de dégoûtés, d'athées à faire pâlir d'envie une loge maçonnique''.

Ces constats ne choqueront que ceux qui confondent religion et endoctrinement, ou refuge hors du réel. Mais c'est à eux aussi que s'adresse le témoignage de Le Gendre, pour les aider sur les voies de la foi. 

La foi ne peut pas être ''réaction, affirmation d'une identité contre une autre identité, revendication d'être les seuls authentiques détenteurs de la vérité...'' Un chrétien ne ''possède'' pas la Vérité : c'est elle qui le possède et bouscule ses petites certitudes à chaque instant. Un chrétien trahit l'Évangile quand il prend la posture identitaire, presque toujours entachée de ''jeux politiques'' et d' ''orgueils cabrés''

Devenir chrétien c'est devenir disciple du Christ. Donc ''sortir'' de nos lieux clos, comme dit le pape François. Ou comme dit Le Gendre, ''ne pas se laisser enfermer dans ses origines, et, au contraire, s'appuyer sur elles pour les dépasser : s'en servir comme d'un tremplin pour atteindre une autre manière de croire, plus juste et plus fidèle. Une autre manière d'agir aussi''. Ici le mot ''origines'' désigne, non  pas l'essentiel (le kérygme et le sacrement du baptême), mais le dérivé : les milieux sociologiques qui se réclament d'une identité religieuse ;  situation honorable mais dégénérant facilement en prétexte, donc en contre-témoignage, et engendrant ainsi la cathophobie. Idolâtrer est contraire à l'Évangile ; confondre catholicisme et culte tribal relève du paganisme.''Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, viens et suis-moi !'' (Matthieu 8 :22). Selon Le Gendre et de nombreux autres écrivains chrétiens, ''rien de grand ne se réalise sans qu'à un moment ou à un autre il y ait rupture''. Rupture avec ''un monde'', ''un style de vie'', ''une famille'', ''des maîtres'', ''un confort intérieur''...

Si pour suivre le Christ nous devons ''dépasser'' nos origines, il faut vivre une purification et un recentrage sur l'essentiel. C'est une conversion, témoigne Le Gendre :''se découvrir un beau soir fils de Dieu, qui reçoit toute l'affection de son Père du Ciel'' ; donc entrer en relation personnelle avec ce Père... Dieu s'introduit dans votre existence, ''y trouve sa place, l'habite d'une présence incroyable''. Croire en Dieu (''qui me donne à chaque instant tout mon exister'' [1]), c'est autre chose – dit Le Gendre – que de croire ''que Dieu existe'' : cela,''les démons aussi le croient'' [2]. Croire seulement que Dieu ''existe'' a été la faute des deux derniers siècles, ère d'une religiosité bourgeoise dont le factice a fait naître – par réaction – un athéisme de masse.

Chercher à aimer le Père dont on se découvre le fils, c'est se mettre à lire l'Évangile pour ''l'habiter'', témoigne Le Gendre. ''Aimer au nom du Christ'', accepter d'être ''les porteurs de la tendresse de Dieu'', c'est la voie de la nouvelle évangélisation et elle suppose que nous fassions ''de la place'' en nous, ''dans cette région que les psychologues appellent le coeur profond et les personnes religieuses l'âme'' (et que nous ne connaissons ''pas toujours très bien''), pour y laisser entrer cette tendresse que Dieu réserve à chacun ; tendresse qui ''nous traverse, sans nous quitter, pour rejoindre ceux que nous côtoyons''...

Dans l'avant-dernier chapitre du livre, Olivier Le Gendre évoque son cancer. Ce récit très concret touchera profondément les malades et ceux qui les accompagnent : ''Dieu a agi avec moi en comptant sur les personnes rencontrées pour qu'elles trouvent l'attitude juste, l'aide appropriée, la délicatesse dont j'avais besoin. Nous sommes les mains de Dieu qu'il veut mettre au service du monde. Le croyant, le chrétien, devient la main de Dieu lui-même, la main qui soulage et parfois guérit. Je découvris aussi qu'à moi, qui ressentait tellement le besoin d'être protégé, il m'était demandé, à travers ma faiblesse, de désigner des chemins à ceux que je rencontrais.'' Dans la maladie ou dans les autres circonstances, les vrais chemins spirituels sont ceux qui ne s'éloignent pas de la condition humaine. 

Ce livre est salubre. Puissent beaucoup de catholiques français le lire, et en débattre.

 

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[1] Père Jérôme, Dieu père et ami  (Parole et Silence).

[2] Lettre de saint Jacques, 2:19.

 

 

Commentaires

MALADES

> Pour se retremper dans notre baptême, c'est-à-dire dans l'oeuvre du Christ aujourd'hui, je recommande cette vidéo essentielle, qui est un reportage sur les nombreuses guérisons miraculeuses, actuelles, à Notre-Dame-des-Champs, à Paris, à la prière pour les malades tous les jeudis soirs à 18h30 :
http://www.youtube.com/watch?v=61bKWFQY-gc
Magnifique ! Gloire à Jésus Sauveur !
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Écrit par : Alex / | 19/03/2014

XIXe et XXe

> Je n'ai pas lu l'ouvrage, cher Patrice, mais dans votre désir de secouer le cocotier vous n'y allez pas de main-morte !
Un passage de votre commentaire en particulier me fait sourciller: "Croire seulement que Dieu ''existe'' a été la faute des deux derniers siècles, ère d'une religiosité bourgeoise dont le factice a fait naître – par réaction – un athéisme de masse."
Nous parlons bien, n'est-ce pas, de ces deux siècles qui ont pu naître, mettons, avec Anne-Catherine Emmerich et s'achever, disons, avec Christian de Chergé ?
En passant par une foultitude de témoignages, de Bienheureux et de Saints de premier ordre, de vies apostoliques, d'apports théologiques, de recherches spirituelles, de confrontations aux autres modes de pensée et d'appréhension de la vie et du monde:
En ce qui concerne ces confrontations, elles sont telles que la Chrétienté n'en a pas connu depuis ses débuts, depuis les temps Pauliniens et les Pères de l'Eglise ?
Il n'y a pas "faute" à ne pas avoir su procéder à l'extinction des Lumières - à la déferlante qui s'est abattue sur ces deux siècles.
Ladite religiosité était peut-être, parfois, bourgeoise et de façade en milieu urbain et "intellectuel". Mais l'Eglise avait un tout autre dynamisme qu'aujourd'hui, ici en France, dans les milieux populaires !
Mais c'est à se demander si, depuis, il n'y a pas un exil de plus en plus massif de la Chrétienté à Babylone, cette dernière s'étend tellement, il faut dire...
Pour citer Francis Jammes (Monsieur le curé d'Ozeron, chapitre IV, un bon livre pour se remémorer ce que pouvait être un prêtre il y a une centaine d'années en France) à propos de de la Charité au sens premier de vertu théologale, incompréhensible pour le "Siècle":

"Une telle doctrine peut faire sourire ou scandaliser le monde. Mais ceux qui vivent de la Grâce, ils ne faut point qu'ils raisonnent à la manière des païens, ils doivent être surnaturels".

Surnaturels ? Ce que Mgr Jacques Blaquart, aujourd'hui évêque d'Orléans, nous assénait naguère, lorsqu'il était évêque auxiliaire, pour illustrer le trouble des temps: "soyez parfaits", impératif asséné avec la puissance et la conviction que pouvaient donner sa stature athlétique...

A.


[ PP à A. :
- Mais je n'ai pas écrit que la ''religiosité bourgeoise'' était le vrai catholicisme des deux derniers siècles !
- J'ai écrit : "religiosité". Je n'ai pas écrit : "religion", ni "foi au Christ"... La religiosité est à la religion ce que le relativisme est à la conception de l'existence : une dégradation-déviance.
- La vision bourgeoise de la vie (mi-XIXe à début XXe) a été étudiée par nombre de philosophes et de théologiens catholiques, qui y diagnostiquent une déviance et une dégradation du christianisme. En réduisant celui-ci à une morale familiale pour les bonnes dames pendant que les bons messieurs faisaient leurs affaires, cette religiosité bourgeoise a scandalisé les vrais croyants (auxquels se rattachent les noms que vous citez).
- Elle a scandalisé aussi (progressivement mais sans rémission) les classes sociales exploitées, qui ont vu ce pseudo-catholicisme et l'ont pris pour le vrai, voyant ainsi dans ce dernier la religion des exploiteurs. Cause profonde de la déchristianisation... Celle-ci s'est accélérée à la fin du XXe siècle pour d'autres raisons, et le tout aboutit - en France aujourd'hui - à une raréfaction du catholicisme populaire.
- Vatican II a eu pour objectif de libérer le témoignage catholique de ce quiproquo des "deux derniers siècles". On en trouve l'écho dans le remarquable petit essai du cardinal Congar : "Pour une Eglise servante et pauvre" (Cerf), qui est l'un des livres de chevet du pape François, avec quelques autres auteurs dont Léon Bloy : l'imprécateur anti-bourgeois du catholicisme 1900 !
- Voilà la réalité historique. Elle est complexe. Il ne faut pas se cacher les éléments dérangeants...

Merci de votre message. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Aventin / | 20/03/2014

SORTIR DU "QUI SE RESSEMBLE S'ASSEMBLE"

> "Seul l'accès à un tout Autre que moi-même, me fait me détacher de moi-même de sorte que je puis vivre ma vie dans l'espace que m'ouvre le fait d'être accueilli par l'Autre. Est-ce que, de fait, je suis sérieux avec cette volonté de me détacher de moi-même pour me tourner vers Dieu et son amour ? Est-ce que, effectivement, j'essaie aussi résolument que Jésus, de franchir l'espace confortable du 'qui se ressemble s'assemble' ? Pour en décider, la critère solide reste la miséricorde à l'égard de l' 'Autre' tombé dans le besoin, qui, les dérangeant du même coup, croise et recroise sans cesse mes chemins..."
(Médard Kehl, s.j.)
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Écrit par : Amicie T. / | 20/03/2014

LA GRANDE PERTE DU CATHOLICISME MODERNE

> Médard Kehl, s.j. est l'auteur de "Et Dieu vit que cela était bon", une petite somme de Théologie de la Création, qu'il faut avoir lue !
Ce qui me permet de faire la transition avec ceci : "En réduisant celui-ci à une morale familiale pour les bonnes dames pendant que les bons messieurs faisaient leurs affaires, ..." (PP dixit)
Coïncidence ? Je pensais exactement mot pour mot à cela tout à l'heure, à genoux dans la vigne. Voilà, en résumé et succinctement, le fruit de ma réflexion du jour :

La grande perte du catholicisme moderne, c'est la perte de la vision cosmique du Salut opéré par le Christ, opérée en parallèle historique avec la révolution industrielle.
Non, l'univers créé n'est pas que le simple cadre nécessaire, parce qu'il en fallait bien un, par défaut, neutre, allez hop Dieu a créé le monde, avec trois arbres et deux piafs, pour y coller l'homme au milieu !
Cet anthropomorphisme intellectualisant, déconnecté du réel jusqu'à devenir une fausse morale petite-bourgeoise comme vous le décrivez, qui se fait aux dépens de l'univers créé par Dieu, création qui a souffert de la Chute, qui a été sauvée par la mort et la résurrection du Christ, et qui sera restaurée dans sa perfection initiale à la fin des temps, a contribué, je le crois vraiment, à la déchristianisation des couches populaires encore collées au réel concret de la vie terrienne.

Et aujourd'hui, toutes ces personnes qui retournent à la terre, et qui vivent ce contact permanent à la nature de façon réellement mystique, comment les ré-évangéliser, si ce n'est en retrouvant cette dimension cosmique, en leur affirmant que oui, leur expérience mystique au sein de la création est réelle, belle, car vraie !
"J'ai plus appris en compagnie des arbres que dans les bibliothèques", disait en substance St Bernard (il me semble) ; le livre un et indivisible de la création est la première révélation, accessible directement à tout homme, par l'expérience directe !

Et si, au lieu d'adorer un mystérieux magma informe d'énergies ou autres trucs new-age vaporeux (voire carrément ésotériques ou occultes), au lieu d'adorer la Pacha-Mama, ils se tournaient vers son Créateur ? Si, au lieu d'adorer l'image, le reflet, il se tournaient vers sa source ?

Voilà, c'est mon grand appel, à la suite et complémentaire à celui d'Olivier Le Gendre : on ne peut faire l'économie de cette redécouverte de la dimension cosmique du salut, écrite noire sur blanc, à de nombreuses reprises, dans la Bible comme dans le magistère de l'Eglise.
Cette question est de première importance !
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Écrit par : PMalo / | 20/03/2014

ANGLAIS

> Un amusant article pour ceux qui lisent l'anglais.
En voici d'autres qui devraient devenir chrétiens ...

http://www.firstthings.com/web-exclusives/2014/03/celebrity-pastors-walter-white-problem
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Écrit par : luc2 / | 20/03/2014

AUTRES CAUSES

> Comme causes de déchristianisation, il n'y a pas eu que le "catholicisme bourgeois".

1- On voit en Ile le France un catholicisme populaire vivant, joyeux: celui des gens d'Outre-Mer dont les ancêtres ont pourtant subi l'esclavage, face auquel l'Eglise a sérieusement manqué de tonus.

2- La situation de certains diocèses ruraux est calamiteuse, et le dénigrement des dévotions populaire au profit de liturgies minables, par ceux qui auraient du être nos élites y est pour quelque chose. Il s'agissait d'un milieu nullement bourgeois mais arrogant et fermé sur lui-même. J'ai entendu de mes propres oreilles un brave personne très dévouée dire, à propos de l'arrivée de prêtre polonais et africains: "nous, on ne boit pas de cette eau là, nous avons organisé nos EAP, ça tourne bien", sur un ton qui voulait dire "nous les laïcs avons le pouvoir et n'allons pas nous faire déposséder par des curés étrangers."

3- Dans un milieu plus cultivé, la focalisation sur une civilisation gréco-latine surévaluée par un aveuglement à l'égard de ses tares profondes, sa violence sociale en particulier, et sa violence tout court, a aboutit à une idolâtrie du pouvoir, bien visible dans certains cercles royalistes mais aussi persistante sous d'autres formes dans le courant démocrate-chrétien.
C'est une des conséquences les plus funestes de la longue coupure d'avec les chrétiens orientaux (Mésopotamie, Perse, Asie Centrale) avant l'extermination presque complète de ceux-ci sous Tamerlan.
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Écrit par : Pierre Huet / | 21/03/2014

FAMILLES

> Je viens de le finir. Simple, clair et lumineux. Peut-être mon "choc de lecture " 2014 (le "choc 2013" ayant été "Survivre à l'effondrement économique" de P. San Giorgio…comme quoi il ne faut désespérer de rien). Et pas besoin d'être issu de la "bourgeoisie catholique" pour en faire son profit !
Au sujet de la … déchristianisation des bonnes familles, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à un passage d'un petit livre écrit par Patrick Chalmel au milieu des années 80 : "Lettre ouverte à un enfant à naître".
Dans ce passage, l'auteur s'interrogeait sur la solidarité spirituelle entre les générations. Dans certaines familles, la foi s'affadissait de génération en génération : grands-parents pratiquants, parents simplement croyants, enfants ne faisant même plus baptiser leurs rares rejetons...
Alors que dans d'autres, la foi s'approfondissait, pour donner in fine de véritables apôtres.
Pourquoi ?
Selon lui, cette évolution était due au fait que, dans le premier type de famille, Dieu était bien présent, certes. Mais AUSSI et non pas D'ABORD. Les personnes étaient loin de vivre l'appartenance au Christ qu'elles affichaient au dehors... Avec des résurgences inattendues : l'auteur citait le cas du "brave grand-père", pourtant "encore pratiquant", refusant de faire administrer le sacrement des malades à sa fille atteinte d'un cancer, "par peur du qu'en dira-t-on"...
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Écrit par : Feld / | 21/03/2014

PAIX À SON ÂME

> Paix à son âme, je viens d'apprendre son décès ce 10 octobre.
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Écrit par : Luc2 / | 24/10/2014

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